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 l'amour cet anxiogéne (mots imposés)

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AuteurMessage
lulli
Admin
lulli


Messages : 757
Date d'inscription : 23/07/2009

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MessageSujet: l'amour cet anxiogéne (mots imposés)   l'amour cet anxiogéne (mots imposés) Icon_minitimeLun 11 Avr - 22:30




Il me disait, blanc c'est blanc, noir c'est noir, un c'est un, zéro-zéro, tu es toi je suis moi. Il évoluait dans un monde binaire sans peut-être, sans pas sûr que, sans solitude, sans dédale, sans écart. Son Bonjour qui résonnait, faisait écho à mes au revoir, je me souviens, il ne riait pas de mes soupirs, il ne riait pas de mes sourires, il ne savait plus rire, il ne savait plus pleurer non plus. Mon bouchon de champagne dansait toujours sur le bord du goulot prêt à sauter au mur, à éclater, à me faire danser ou casser la vaisselle... mais lui, il ne me comprenait pas, me demandait du calme, du sérieux en reprenant un de ses cachets pour le mal de crâne... un de ses calvaires et de ce fait un des miens. Lorsqu'il enlevait la capsule de sa boîte de médicaments dans un claquement sonore, j'avais tout intérêt à me ranger bien droite en jolie poupée de porcelaine, à repeindre la tapisserie, à me cacher sous le lit, en un mot, à ne pas exister pour ne pas l'exciter et l'énerver ! Il était la belle caricature de sa jeunesse, beau, puissant, fier et autoritaire sous ces allures de douceur. Je notais tout dans un carnet à l'époque, j'avais un peu d'espoir, l'amour ça devait calmer mes angoisses, ça le devait que diable ! C'était son rôle et son devoir non ? Une carte avec un trèfle à quatre feuilles d'où coulait du sang y était glissé, c'était sa déclaration, oui, je n'y avais point vu de signes... ma cartouche d'encre était presque vide et sur la fin de ce vieux cahier, le mot "chiffon" reste seul sans suite. Je suis ce chiffon sans sens que l'on tente au matin de réveiller au clairon de l'amour-passion, l'amour-fusion ! Ah ça... que j'ai pu y croire à ses yeux douceur coton... "Ravi de faire votre connaissance" de sa voix grave un peu terne comme hésitant à aller vers plus aiguë, considérant l'air comme une possible mort subite…

Je l'ai aimé le jour où, à la fenêtre, les mains sur la corniche qui surplombe la rue, il m'a dit sans me regarder de sa voix sans souffle : "je t'aimerai autant que le vide me happe". C'est par cette phrase sans sens qu'il m'a montré que sa vie n'était que décombres et que je n'étais qu'un reflet de sa folie, c'est là que je me suis dis, comme ça, sans le savoir, que oui, c'était lui qui serait ma bouée de secours et mon amant-enfant. J'ai passé ma main, pour le défroisser, sur mon vieux chemisier un peu décrépi que ma mère m'avait offert et qui - me dit-il par la suite - me donnais un air défroqué des plus drôles. En silence j'ai rejoins son vide et j'ai tenté d'élucider ses peurs, d'en comprendre le contour, d'en frôler la réalité... Mais je n'y ai découvert que de pâles figurines d'un passé à jamais éteint qui se reflétaient comme autant de monstres et qui arboraient de multiples fleurs dans les cheveux et dans les mains... J'eus un moment de recul devant son gouffre mais nous avions scellé un pacte, et pour adoucir mes craintes je sortais au jardin : près du fraisier je retrouvais un peu de mon passé. Il ne le supportait que peu, furibond il venait me cueillir à la branche fragile qui me soutenait encore, entre deux fruits pourrissant d'une généalogie perdue, sa voix dans mon dos qui se courbait, ce "petite gueuse" qui me donnais l'envie de le gifler, de le laisser pour mort, là, enfin horizontal et non plus avec ces vingt centimètres de plus que moi, à m'insulter. Il me fallait jouer sur la corde de l’improvisation, soit m'évanouir, soit pleurer, soit crier, quoi qu'il en soit, je jouais et le premier jeton se devait d'être le bon... si par malheur je ne rompais pas sa corde sensible, il était capable de me frapper à coup de liste d'horreur que je lui aurais infligé depuis le premier regard, il était capable de me faire regretter de ne pas l'avoir précipité dans le vide au lieu de le suivre... Et une fois la locomotive lancée, le train suivait sans fin, traversant tous les versants de ma vie, bousculant tous les actes que j'avais pu commettre, me harcelant et me laissant pantelante, essoufflée, sans maturité me hantait-il une fois calmée, pis qu'un nourrisson, écrasé par le poing même de ses mots. Il montait tout seul en mayonnaise et me forçait à le manger sans pain, sans rien, quitte à en vomir, quitte à le haïr, il me voulait à sa merci, et il m'avait, il m'avait depuis bien longtemps déjà.

Notre monde de folie amour, on l'avait construit sans savoir les montagnes qui nous sépareraient de plus en plus, et ça n'est pas à coup d'ongles que l'on creuse des galeries pour se rejoindre... souvent, j'avais le mot pardon en tête, souvent s'entend toujours. Pardon d'être, pardon d'avoir tant voulu, pardon pour la pendule, pardon pour les fraises pas cueillies à temps, pardon pour... pardon, pardon. Pardon... ma litanie sans fin en boucle dans ma tête résonnait de jour et de nuit, je le regardais à contre-jour tirer sur l'une de ces pipes, et je lui murmurais de loin de m'excuser... il avait depuis longtemps perdu le peu de gaîté que je lui avais offert au tout début en faisant l'autruche avec une longue plume et un pompon que je promenais sur son visage si maigre et anguleux qu'il en était un paysage aride et magnifique... oui, en qualité d'homme, il était mon rêve et ma solution, mon but et ma déraison... Nous n'avions pas de recette pour vivre ensemble, nous ne savions pas nous y prendre, à jouer, on perd parfois, on a tenté de gagner, en s'égratignant, avec difficulté en prenant du retard sur ce que vivre veut dire. Notre ruelle sombre dès les premières caresses était devenue glauque et puante de sueur et de salives mêlées, non salubre et qui ne faisait qu'augmenter le stress de nos désirs. Il me disait qu'à force de vouloir décrire notre amour, tout mot sortant de nos bouches tordues serait superfétatoire et maigre. Que l'amour ça se vivait et ça nous tuerait mais qu'il ne fallait jamais le dénaturer par des mots dont la taille serait toujours trop restreinte, que c'est sous terre qu'il était voué à finir et qu'il était bien heureux que notre union fut stérile pour ne pas avoir à entraîner dans notre perte des restes de tétines crasseuses. Oui, il me disait que sans lui, je n'étais rien et que sans moi il n'était pas même un zeste d'humain.

Oui, il me disait que sans moi, il n'était rien, et que sans lui, je n'aurais pas une once d'humanité.

Alors je suis partie.
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